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Froid, plaisir de la glisse et tradition

Société

Russie    //   Expérience

Fera-t-il un jour suffisamment froid pour dissuader les Saint-Pétersbourgeois d’aller faire du patin à glace ? C’est improbable. Quand on a goûté au plaisir glaciaire des glissements sur l’eau gelée de la capitale culturelle, difficile ensuite de bouder cette expérience unique en son genre et les instants réconfortants qui lui succèdent. Guide de l’apprenti patineur.

La première fois, on croit être fou : s’aventurer dans l’hiver glacé un sac de sport à la main, quelle idée ! On se souvient avoir observé, avec moquerie, les autres s’aventurer dans le grand froid, une paire de patins à la main. Pendant ce temps, amusé, on restait tranquille dans son intérieur douillet, une tasse de thé brûlant à la main. On se demandait quelle force vitale pouvait bien animer ces hurluberlus.

Quelle sorte de miracle pousse donc mon beau-père d’une cinquantaine d’années à dire qu’un dimanche par -30oC est une journée idéale pour partir à la conquête des patinoires de la ville ?! Mais surtout, par quelle absurdité décidé-je de le suivre ?

S’équiper : une science

Tout d’abord, il faut s’équiper. « Chaudement ! » insiste Jenya, mon beau-père, qui ne plaisante pas sur le sujet. Je dois me vêtir selon le principe de la double-couche : deux paires de chaussettes, deux paires de gants, un collant et un pantalon, etc. C’est une procédure longue, fastidieuse, qui laisse invariablement en sueur sur le palier de l’appartement. En effet, si la température extérieure est polaire, celle à l’intérieur est scandaleusement haute. Les Russes affectionnent particulièrement de se balader torse-nu et en caleçon chez eux en plein hiver. Souvent, les vieux appartements à système centralisé ne permettent pas de baisser le chauffage, si bien qu’on est obligé d’ouvrir la fenêtre pour refroidir la pièce. J’insiste donc, en tenue de patin à glace sur le palier de mon appartement, il fait particulièrement chaud.

Je commence ainsi à entrevoir le défi que pose l’habillement : réchauffer le corps tout en le laissant respirer. Un t-shirt trempé par -30oC, c’est la garantie de tomber malade. Il faut donc préférer les fibres synthétiques, sous-vêtements thermiques et autres textiles idoines bien connus de celles et ceux qui se sont déjà aventurés dehors par ces températures. C’est un peu cher mais indispensable si je veux éviter d’avoir à me changer plusieurs fois pendant la session. Avant de partir, je n’oublie pas ma paire de patins, achetée une quarantaine d’euros au supermarché sportif du coin, ainsi que ma grande thermos remplie de thé bouillant. Le pingouin figé que je serai bientôt sur la banquise appréciera ce souci du détail.

La technique des vrais de vrai

C’est parti, je suis dehors ! Certes, il fait froid mais ce n’est plus ma préoccupation principale. Désormais, il m’appartient de trouver une patinoire, katok en russe. À Saint-Pétersbourg, ville de cinq millions d’habitants qui compte plusieurs dizaines d’îles, de lacs et de rivières gelées trois mois dans l’année, on pourrait penser qu’il n’y a que l’embarras du choix. Que nenni ! Tout dépend de ce qu’on cherche. Il y a deux écoles : dans la première, on se rend dans l’une des patinoires payantes de la ville. Certaines sont à la mode, la glace y est souvent de très bonne qualité mais elles sont invariablement remplies de monde en-dehors des heures habituelles de travail. Pour mon beau-père Jenya, qui porte encore les T-shirts des années 80 de sa jeunesse, payer n’est clairement pas une option. Niet ! Lui est de la seconde école. Partir à la recherche d’un katok doit donc avant tout être une aventure, une quête d’explorateur. Il faut se donner du mal mais ce doit être gratuit ! Malin, il identifie à l’avance sur une carte les bons endroits potentiels et une fois sur place, il observe.

[…]

Article complet au format papier dans Mayonèz Mag Nº6. Retrouvez tous les aperçus d’articles de Mayonèz Mag dans la section Archives.

Texte: 
Guillaume Landais

Photographie: 
Anastasia Oleynik

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UN PAS DE CÔTÉ DANS LES MÉTROPOLES DU MONDE

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